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libéralisme libertaire - Page 2

  • La Super-classe mondiale contre les peuples...

    Les éditions Via Romana viennent de publier un essai de Michel Geoffroy intitulé La Superclasse mondiale contre les peuples. Énarque, essayiste et contributeur régulier au site de la Fondation Polémia, Michel Geoffroy est l'auteur avec Jean-Yves Le Gallou du Dictionnaire de Novlangue (Via Romana, 2015).

    Le livre est disponible à la commande sur le site de Via Romana.

     

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    " En Occident on ne vit plus en démocratie mais en post-démocratie : les gouvernements ne gouvernent plus mais obéissent aux marchés et aux banques, les puissances d’argent dirigent les médias et les peuples perdent leur souveraineté et leurs libertés.
       Pourquoi ? Parce que depuis la chute de l’URSS le pouvoir économique et financier s’affranchit du cadre national et veut gouverner à la place des États. Parce que la fin du communisme nous a libérés de la Guerre froide, et lui a succédé la prétention obstinée du messianisme anglo-saxon à imposer partout sa conception du monde, y compris par la force.
       Ce double mouvement s’incarne dans une nouvelle classe qui règne partout en Occident à la place des gouvernements : la super classe mondiale.
       Une classe dont l’épicentre se trouve aux États-Unis mais qui se ramifie dans tous les pays occidentaux et notamment en Europe. Une classe qui défend les intérêts des super riches et des grandes firmes mondialisées, sous couvert de son idéologie : le libéralisme libertaire et cosmopolite. Une classe qui veut aussi imposer son projet : la mise en place d’un utopique gouvernement mondial, c’est-à-dire la mise en servitude de toute l’humanité et la marchandisation du monde. Une classe qui manipule les autres pour parvenir à ses fins, sans s’exposer elle-même directement.
       Avec La Superclasse mondiale contre les peuples, Michel Geoffroy dresse un portrait détaillé, argumenté et sans concession de la superclasse mondiale autour de cinq questions : que recouvre l’expression superclasse mondiale ? Que veut-elle ? Comment agit-elle ? Va-t-elle échouer dans son projet de domination ? Quelle alternative lui opposer?
       Un ouvrage de référence pour comprendre les enjeux de notre temps. "

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  • “Sociologie critique”, grands principes et grands sentiments...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur le site du nouvel Économiste et consacré à l'alliance passés entre certains milliardaires rapaces et d'anciens militants trotskistes pour saper les bases de l’État-nation...

     

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    “Sociologie critique”, grands principes et grands sentiments

    Imaginons qu’un chercheur proche de la droite libérale ou nationale fasse financer une étude par un oligarque ami de Poutine – en prime, un peu filou. Qu’est ce qu’il prendrait ! On entend d’ici le tollé des journalistes-procureurs sur l’affreuse compromission… Le retour des collabos. Une pétition indignée dénoncerait l’étude “qui ne passe pas”… Une manif’ peut-être…

    Prenons à l’inverse un chercheur partisan de la gauche radicale, hostile à la “société de classes”. De ceux qui excusent tout malfaiteur ou terroriste, sanguinaire djihadi ou migrant-violeur, comme “victime de l’exclusion et du racisme”. Quelle chance il a, ce “sociologue critique” ! Car lui peut toucher des subventions de fort glauques requins de la finance, et dans un silence de cathédrale, encore.

    Désignons d’abord le requin, puis voyons qui il “aide” et pourquoi. Voici M. George Soros, capitaliste “de gauche”, déjà condamné et re-condamné par la justice française ; enfin, débouté par la Cour européenne des droits de l’homme, suite à sa condamnation pour une arnaque visant la Société Générale.

    Est-il calmé ? Non. En décembre dernier, le ‘New York Times’ – qui est loin du brûlot anticapitaliste – s’indigne : alors que “les inégalités sont les plus criantes depuis un siècle”, des milliardaires ont, pour “fuir l’impôt”, monté à leur seul profit un indécent système d’évasion fiscale. Passons les détails : sous le titre “A Private Tax System Saves Billions For The Wealthiest”, l’“ésotérique combine” est révélée par le ‘New York Times’ du 30 décembre dernier.

    Parmi ces ploutocrates, "the liberal billionnaire George Soros" dont le NYT, choqué, souligne qu’il “appelle publiquement à taxer les plus riches, tout en s’enrichissant plus encore par l’évasion fiscale”.

    Rappel : M. Soros possède 24 milliards de dollars – peu taxés, car il a liquidé son hedge fund (terme qui, pour l’opinion, pue l’arnaque à cent mètres), pour un aimable “family office”. On a compris que, passant du hedge fund à l’émouvant “bureau familial”, M. Soros évite encore bien des taxes.

    Autre truc lui permettant de “fuir l’impôt”, la philanthropie : M. Soros investit quelques décimales de ses milliards dans des fondations “humanitaires”. Cela fait moins vampire et plus père Noël, donc permet aux médias de le présenter comme “investisseur et philanthrope”, non comme “ploutocrate”. M. Soros se disant “de gauche”, ses fondations font dans les grandes causes comme l’injustice et le racisme.

    C’est ainsi qu’en 2009 (M. Soros est déjà condamné par la justice française), sa fondation Open Society Justice Initiative finance une étude sur les contrôles d’identité “au faciès” de notre police nationale. Dans le jargon de la “sociologie critique”, cela donne “Les stéréotypes et préjugés visant les minorités visibles”. Il s’agit en fait d’intimider la police – à la joie de voyous, voire de terroristes, parmi lesquels le Berrichon n’abonde certes pas. Car bien sûr et sans nuances, l’étude conclut en taxant de racisme exacerbé une police brutale et réac.

    Or qui réalise cette étude, pour la filiale “justice” de l’Open Society Institute de M. Soros ? Deux chercheurs-militants du CESDIP [Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales, ndlr], un libertaire centre de recherche français, notre Vatican de la culture de l’excuse, notre Mecque de la “sociologie critique”. Un centre dont, depuis deux décennies au moins, les positions publiques sont constamment alignées sur celles de la gauche militante la plus extrême, entre trotskisme et anarchisme Des chercheurs et un centre que la subvention d’un prévaricateur condamné n’a pas semblé gêner plus que ça.
    Ainsi se rejoignent deux forces libertaires : des milliardaires et d’ex-militants désormais proches du mercenariat œuvrent ensemble à fragiliser l’État-nation, en l’occurrence français, seul rempart contre les anarchies conjuguées de Wall Street et des quartiers hors contrôle.

    Une idée : durant la révolution culturelle, la direction du Parti communiste chinois se trouva jadis bien gênée. Les gardes rouges s’affirmaient en effet plus à gauche que le PC – ce qui, pour un marxiste-léniniste, est impossible. Pour riposter, la propagande du PC ajouta alors toujours à l’idéogramme “garde rouge”, les signes “de-gauche-en-apparence-mais-de-droite-en-réalité”. Peut-être faudrait-il réhabiliter cet habile logogramme, pour les centres de recherche naguère de gauche et désormais voués à servir M. Soros & consorts ?

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  • L'esbroufe Foucault...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous la conférence donnée par François Bousquet à Paris, le 9 novembre 2015, devant le Cercle Aristote, à l'occasion de la sortie de son pamphlet «Putain» de Saint Foucault - Archéologie d'un fétiche (Pierre-Guillaume de Roux, 2015). Journaliste et rédacteur en chef adjoint de la revue Éléments, François Bousquet a déjà publié une biographie de Jean-Edern Hallier.

     

     

     

     

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  • Grands médias d'information, la mue invisible...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur le site du nouvel Économiste et consacré à la bienpensance que les médias dits d'information ne cessent de nous servir et qui n'a plus aucun rapport avec la réalité des faits... Xavier Raufer vient de publier un essai intitulé Cybercriminologie aux éditions du CNRS

     

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    Grands médias d'information, la mue invisible

    Les "grands médias d'information" ont quasiment cessé d’informer ; de porter au public, à distance critique, les faits pertinents et vérifiés ; à partir bien sûr du réel constatable et non d’idéologiques lubies. Toujours plus, ces médias vendent la salade de leurs propriétaires libéraux-libertaires ; tout en vantant, à la Tartuffe, leurs “valeurs” et leur indépendance. Désormais, ces médias délaissent l’échange d’idées pour la brutale affirmation d’un “There Is No Alternative” (TINA) à la Thatcher. Qui s’oppose à cette ligne est noyé dans le silence.

    Voici donc trois indéniables et récents événements, importants pour l’opinion, dont pourtant nul n’a lu une ligne dans ces médias-des-milliardaires :

    • Séquelles des émeutes anglaises d’août 2011 : en août 2011, on se souvient des émeutes dans des métropoles britanniques, dont Londres. Comme d’usage unanime, les médias-des-milliardaires présentent alors ces émeutiers comme des victimes de l’exclusion, du racisme et d’une police fasciste. Puis, le silence tombe sur les séquelles judiciaires de l’affaire. Suite à ces émeutes, 3 914 “damnés de la terre” sont donc interpellés puis libérés. Là-dessus, 1 593 récidivistes, dont 168 notoires gangsters. Or d’août 2011 à juillet 2014, ces “misérables” commettent ensemble 5 878 infractions graves, dont 12 homicides, 1 172 agressions violentes, 21 viols, 719 cambriolages, 451 vols violents et 1 819 infractions aux stupéfiants. Une seule de ces “victimes” commet 72 crimes et délits en trois ans. Dans la presse d’information française, rien.

    • Dépénalisation du Cannabis au Colorado : C’est chic et moderne – en plus, ça rapportera une fortune en taxes à l’État. Le banc de poissons médiatique est donc à fond pour ce ludique usage. Or voilà ce que révèlent les enquêtes officielles conduites au Colorado, un an après la dépénalisation du cannabis :

    - Accès facilité de la drogue aux mineurs,
    - Forte hausse en principe stupéfiant (THC) de la drogue disponible ;
    - Emprise intacte (quoique différente) du crime organisé ;
    - Augmentation de l’alcoolisme (on prévoyait une baisse…) ;
    - + 150 % de toxicomanes-SDF à Denver, une explosion ;
    - Sur cinq ans, + 100 % d’accidents mortels de voiture après usage du cannabis ;
    - Taxer la Marijuana rapportera 69 maigres millions de dollars à l’État… sur un budget de 27 milliards. Dix fois moins chère, la marijuana illicite rendrait encore cette taxation moins juteuse.

    Rien de cela dans les grands journaux français.

    • Criminalisation des clients des prostituées : à la joie naïve des féministes et des puritains, les clients des prostituées sont pénalisés en Suède depuis 1999. De fait, la prostitution de rue y a presque disparu, activité désormais numérisée en “escortes” jointes sur Internet. Hormis ce banal effet de déplacement, cette loi conduit à plus de secret et de clandestinité pour les prostituées – donc plus de danger, dit un rapport officiel suédois. Les médias français ? Silence.

    Pour conclure, une requête. Les médias-des-milliardaires offrent désormais des simulacres de “data journalism” nommés “Le Vrai du Faux”, “Décodeurs” ou “Décryptage” – en fait, des outils pour disqualifier les esprits libres. L’auteur leur soumet aimablement les faits et chiffres ci-dessus présentés. Qu’en pensent-ils ?

    Xavier Raufer (Le nouvel Économiste, 20 mai 2015)

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  • Les snipers de la semaine... (103)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur le site du Point, Jean-Paul Brighelli allume le ministère de l'éducation nationale à l'occasion de la semaine de la langue française...

    Une journée de la langue française sans français : un exploit !

     

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    - sur Egalité & Réconciliation, la revue Faits & Documents prend dans son viseur Léa Salamé, journaliste sur France Inter et chroniqueuse de l'émission de France 2, On n'est pas couché.

    Qui est Léa Salamé ?

     

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  • Résister à la destruction libérale du monde...

    Nous reproduisons ci-dessous le texte d'un entretien donné par Charles Robin au site d'informations Novopress. Jeune philosophe, influencé par Jean-Claude Michéa, Charles Robin  a déjà publié plusieurs essais comme Le libéralisme comme volonté et représentation (The Book, 2013) et La Gauche du Capital (Krisis, 2014). Il est également un contributeur régulier des revues Rébellion, Éléments et Perspectives libres.

     

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    Entretien avec Charles Robin, auteur de La gauche du capital (Krisis, 2015)

    Vous accomplissez un travail fondamental de retour aux sources philosophiques du libéralisme, pourquoi ? En quoi la critique économique du libéralisme est-elle insuffisante voire inopérante ?

    En bon disciple de Hegel, je suis absolument convaincu des vertus philosophiques de ce qu’on appelle la « phénoménologie », terme qui désigne – pour le dire vite – la recherche d’une logique sous-jacente aux phénomènes à l’œuvre (qu’ils soient d’ordres économique, politique, mais aussi culturel, moral ou anthropologique). Produire la phénoménologie du libéralisme, c’est donc tenter de remonter de ses effets quotidiens les plus manifestes (la précarité économique grandissante, la détérioration du lien social, Nabilla, etc.) à ses origines historiques et intellectuelles primordiales, pour espérer pouvoir en extraire – suivant la formule consacrée – la quintessence philosophique. Or, sur ce point, l’étude des auteurs libéraux classiques fournit à l’analyse de solides points d’appui. Ainsi, il est intéressant de noter que, dès le XVIIIème siècle, on trouve déjà formulées – notamment à travers la figure d’un Voltaire – les principales implications politiques et culturelles du projet libéral. Notamment (pour ne prendre que cet exemple) l’idée selon laquelle la libre poursuite par les individus de leurs intérêts et de leurs désirs (fondement pseudo-anthropologique de notre actuelle idéologie « libertaire ») constituerait le gage le plus puissant de la prospérité économique des nations capitalistes. L’exemple le plus emblématique (et aussi le plus caricatural !) étant probablement la fameuse Fables des abeilles (1714) de Bernard Mandeville, censée démontrer, sous une forme allégorique, que « les défauts des hommes, dans l’humanité dépravée, peuvent être utilisés à l’avantage de la société civile, et qu’on peut leur faire tenir la place des vertus morales ». Il s’agit donc, à travers cette image, de promouvoir la libre expression des égoïsmes comme source et condition de la croissance économique. Une allégorie écrite il y a trois siècles, et qui anticipait, de façon quasi prophétique, sur les métamorphoses contemporaines de nos sociétés. Soit – pour le dire d’une manière à la fois pédagogique et synthétique – la complémentarité et l’unité fondamentales du libéralisme économique et du libéralisme culturel, qui trouve son incarnation ultime dans l’actuelle fusion idéologique de la Gauche « internationaliste » et de la Droite « mondialiste ».

    Le refus de toute verticalité est pour vous caractéristique de l’idéologie libérale, qui privilégie l’individu à la communauté, la logique de l’intérêt au sens du sacrifice. Pouvez-vous illustrer cette opposition entre transcendance et immanence ?

    L’hypersensibilité hallucinante de la classe politique sur la question de la laïcité (loi de séparation de l’Église et de l’État adoptée en 1905) suffit à vérifier – de l’opportunisme politique d’une Marine Le Pen à la transe mystique d’un Vincent Peillon, pour lequel (rappelons-le tout de même) : « La laïcité [...], c’est une religion de la liberté, c’est une religion des droits de l’Homme » – l’allergie philosophique des libéraux à toute authentique notion de « transcendance », c’est-à-dire qui ne soit pas celle du fétichisme de la marchandise. Il faut en effet comprendre que, selon l’anthropologie libérale, l’Homme se définit d’abord comme un être sensible, c’est-à-dire capable d’éprouver du plaisir et de la douleur. Dans cette conception (fondement de l’empirisme de Locke, puis de l’utilitarisme de Bentham), c’est donc dans sa dimension corporelle et immanente que se situerait l’essence de l’être humain, quand les traditions philosophiques antérieures voyaient davantage dans sa dimension spirituelle et transcendante la qualité spécifique et le lieu d’accomplissement ultime de l’Homme. Par ce renversement dans la hiérarchisation classique des attributs humains (Corps/Esprit), c’est la vision de l’Homme elle-même qui allait se trouver transformée. En refusant d’accorder le moindre crédit philosophique à la notion de « sacré » (hormis à l’occasion de quelques processions sacrificielles telle que la dernière Charlie’s Pride nous en fournit le modèle), la doctrine libérale entérine ainsi, de fait, la réduction de l’être humain à un simple « carrefour de sensations », soumis aux seules lois gravitationnelles de l’intérêt et du désir. Un individu libéral atomisé, amputé de sa partie symbolique (celle qui produit du sens, c’est-à-dire à la fois une signification et une direction) au profit de l’Ego matérialiste triomphant. La transcendance n’est rien d’autre, sous cet angle de vue, que le surpassement effectif (c’est-à-dire réellement incarné) de la cellule de notre ego, condition constitutive de toute émancipation individuelle et collective. C’est la raison pour laquelle je pense qu’aucun socialisme authentique ne peut se concevoir sans cette assise symbolique primordiale, à défaut de laquelle rien ne viendrait justifier (conformément au mot d’ordre du NPA, auquel je souscris pleinement) que « nos vies valent plus que leurs profits ».

    Dès lors, que vaut une société alternative qui ne serait pas portée par des hommes verticaux, c’est-à-dire structurés par une spiritualité forte ? Pour notre vieille Europe, le retour à ses racines ancestrales (un paganisme fécondé par le christianisme) n’est-il pas une condition nécessaire ?

    Dans une perspective politique, la notion de « retour en arrière » n’a, à mes yeux, pas le moindre sens – du seul fait que le temps est un phénomène à sens unique ! En revanche, cela ne signifie pas qu’il faille vouloir refonder en faisant – comme le préconise le chant de l’Internationale – « table rase du passé ». À la suite des Humanistes, je suis profondément convaincu que la sagesse se trouve généralement plus près des enseignements des Anciens que de ceux des Modernes (lesquels n’ont d’ailleurs fait, le plus souvent, que les actualiser en les trafiquant).

    De ce point de vue, il est indiscutable que l’élimination forcenée de toute trace de spiritualité antérieure au « post-modernisme » (dernière secte en date du libéralisme) représente une condition indispensable à la poursuite du projet du capitalisme planétaire.

    Cela étant, je ne limite pas au seul christianisme – ni, d’ailleurs, à aucune autre religion référencée – le cadre d’expression de ce que j’englobe sous l’idée de transcendance. Pour le dire autrement, il n’est aucunement nécessaire de se définir comme « chrétien » pour faire partie de ceux qui, par leur comportement quotidien et leurs actes concrets (à quelque niveau que cela soit), contribuent à améliorer réellement l’état des choses. S’il y a un grand mérite aux travaux des anthropologues structuralistes, c’est d’avoir apporté la confirmation empirique que sous des modalités plurielles et spécifiques selon les cultures se manifestaient, la plupart du temps, des modes de représentation du monde similaires ou analogues. L’observation me semble, dans une large mesure, valable concernant l’identité ethnique ou confessionnelle. À savoir qu’il me paraît peu fondé (si ce n’est par l’inquiétude légitime – et savamment entretenue – de ceux qui voient progressivement leur cadre de vie se transformer sous leurs yeux) d’exclure du « camp des opprimés » des populations – croyantes ou athées, européennes ou extra-européennes – qui, si elles n’emploieront pas forcément le même « langage », pourront cependant signifier une vision du monde commune. C’est là un point crucial à retenir, pour qui s’interrogerait sur la signification de l’actuelle marche forcée vers la guerre civile idéologique inter-communautaire, à laquelle la classe dirigeante nous prépare.

    Vous amenez le libéralisme sur un terrain qui lui est presque étranger, celui de la morale. Il est peut-être temps de revenir ici sur la notion orwellienne de « décence commune »…

    On a souvent reproché à Michéa son usage de la notion de common decency empruntée à Orwell. Le fait est que cette idée d’une décence commune – c’est-à-dire d’une morale ordinaire et intuitive partagée par la plupart des gens, sans référence particulière à une idéologie du Bien ou de la Vertu – offre assez peu de prises à l’analyse conceptuelle (dont les universitaires sont d’autant plus friands qu’elle permet de légitimer leur anaptitude au réel). Pour ma part, je vois dans cette plasticité et ce caractère apparemment « vague » de la notion de common decency la traduction philosophique la plus juste de cette disposition morale des gens ordinaires, dont on ne connaît pas tant la nature et l’origine exactes que les effets quotidiens à travers lesquels elle se manifeste. En d’autres termes, quiconque chercherait à comprendre cette notion de common decency sans en éprouver directement les implications humaines profondes me semble condamné à errer éternellement dans les tunnels sombres du « positivisme », pour lequel seules importent les lois neutres et impersonnelles de la « rationalité ». Pour corriger votre question, je dirais donc que la question de la morale n’est, en réalité, pas étrangère au libéralisme, dans la stricte mesure où, précisément, le libéralisme ne peut espérer prospérer que sur les ruines d’une telle disposition à la common decency. Une morale ordinaire qui transcende, là encore, les appartenances confessionnelles et communautaires, et nous place face à notre propre responsabilité : celle qui consiste à entamer la lutte contre le libéralisme sur le terrain de notre propre conduite. Soit notre capacité à incarner, dans notre existence quotidienne et dans notre rapport à soi et aux autres, ces valeurs d’entraide, de bienveillance et de respect réciproque qu’une telle common decency préconise.

    Mai 1968 a été un formidable point de convergence de l’extrême gauche libertaire et du capitalisme américanisé. Au-delà des slogans et de l’imagerie d’Epinal, quelle est l’importance réelle de ces « événements » ?

    Dans son livre Néo-fascisme et idéologie du désir (1973), le philosophe Michel Clouscard décrivait les événements de Mai 68 comme une « contre-révolution ». Il voulait dire par là que ces événements avaient fourni au libéralisme l’occasion de sa mutation en une forme nouvelle, celle qu’il désigne sous le précieux concept de « libéralisme libertaire ».

    Ainsi, à l’esprit du capitalisme autoritaire et traditionaliste hérité du fordisme et du taylorisme (marqué par la parcellisation des tâches et la mécanisation de l’industrie) allait désormais succéder un nouvel esprit du capitalisme, orienté non plus sur la répression du désir et l’interdit (incarné par le producteur), mais sur sa libération et la permissivité (incarné par le consommateur). En confondant ainsi tragiquement lutte anticapitaliste et lutte anti-autoritariste, les acteurs de Mai 68 allaient ainsi apporter une caution « libertaire » (donc « moderne ») à l’exploitation capitaliste de la liberté et du désir individuels. L’hypersexualisation de nos sociétés contemporaines (pour ce qui concerne, du moins, la présentation médiatique des choses) est évidemment symptomatique de cette opportunité du « lâcher-prise » pulsionnel pour la domination marchande. En sollicitant en permanence la participation à la machine capitaliste de notre bas-ventre, on s’assurait ainsi – si j’ose dire – de maintenir le centre gravitationnel de notre manière d’être et de notre rapport au monde en-dessous de la ceinture. Une forme paradoxale de la domination, puisqu’elle tend à convertir tous nos désirs individuels en ressource énergétique au service de l’industrie de la consommation.

    Vous parlez d’économie libidinale pour caractériser l’étape d’extension du marché que nous connaissons actuellement. Que recouvre ce terme ?

    Pour bien comprendre cette idée, il est absolument nécessaire de rompre avec cette opinion courante qui voudrait que toute domination politique emprunte obligatoirement les voies de l’autoritarisme et de la « soustraction de jouissance ».

    En réalité, le libéralisme aura accompli cet exploit, inédit au regard de l’Histoire, d’avoir su articuler et tenir ensemble la plus complète des dominations avec la plus absolue – mais aussi la plus abstraite – des libertés pour les individus. Il aura suffi, pour ce faire, d’introduire méthodiquement dans nos esprits l’idée (héritée de la philosophie empiriste) que c’est dans la satisfaction de nos désirs pulsionnels que se manifeste le signe ultime de la liberté humaine.

    Une réduction de la liberté à la pulsion, quand les Anciens voyaient justement dans la « retenue » à l’égard de ses passions et de ses affects la forme accomplie de la liberté et de la sagesse. Camus disait : « Un homme, ça s’empêche ». Autrement dit, un être humain se définit d’abord par sa capacité à dire « non », à refuser, à résister. N’est-il pas significatif, à cet égard, que le verbe « succomber » désigne à la fois le fait de céder à la « tentation » et de « rendre l’âme » ? L’économie libidinale du capitalisme – c’est-à-dire la stimulation et l’exploitation de notre libido au profit des intérêts du Marché – débordant évidemment le seul cadre de l’industrie du sexe, puisqu’il conditionne désormais l’ensemble de notre rapport à la marchandise : une marchandise déifiée, sacralisée et fétichisée, par laquelle se manifeste le règne de l’Avoir et du Signe, qui s’édifie sur les décombres de l’Être et du Sens.

    Quelle dette a l’idéologie du marché envers les libertaires Bourdieu et Foucault ?

    Le dénominateur commun des travaux de Bourdieu et de Foucault réside dans leur prétention commune à mettre au jour les mécanismes de la domination, tout en participant, dans les faits, à leur assomption et à leur légitimation. Ainsi, Foucault – qui ne dissimulait pas sa fascination pour la « fièvre généreuse du délinquant » – contribua-t-il, par ses travaux, à entretenir la conception d’un système capitaliste répressif et prohibitif, dont la prison, l’école et l’hôpital représenteraient les structures d’exercice privilégiées. Un capitalisme répressif et anti-hédoniste qui appellerait comme réponse philosophique la promotion d’un individualisme permissif et jouisseur comme horizon pratique de toute émancipation. De même, en faisant de l’École le lieu d’exercice d’une « violence symbolique » à l’égard de l’élève, Bourdieu allait apporter une caution « philosophique » et « libertaire » à la destruction de l’enseignement du savoir critique comme arme effective d’émancipation et de libération à l’égard de l’ordre « bourgeois ». D’où le développement, ces dernières années, des méthodes d’apprentissage basées sur le principe de la « pédagogie différenciée », à partir duquel les élèves sont désormais invités à « construire » leur propre savoir, à l’encontre d’un enseignement traditionnel fondé sur l’instruction et la transmission, vues comme intrinsèquement oppressives et contraires à l’individualité créatrice de l’enfant. Ce qui se vérifie dans ce constat simple que jamais les connaissances élémentaires n’ont été si peu maîtrisées par les jeunes générations, alors même que le savoir n’a jamais été aussi disponible et accessible par tous, le développement récent des technologies de l’information et de la communication – au premier rang desquelles Internet – permettant de vérifier qu’il n’est nul besoin de restreindre l’accès au savoir pour obtenir que la population s’en détourne.

    Vous insistez sur le fait que la faillite de notre système éducatif ne doit rien au hasard. L’économie libidinale a-t-elle donc besoin de n’avoir face à elle que des individus déracinés et décérébrés, anomiques ?

    L’intérêt principal de ce que Michéa nomme, dans l’un de ses livres, l’ « enseignement de l’ignorance », est qu’il tend à produire des individus déliés et amputés d’une part considérable de leur être, à savoir l’intelligence critique.

    Qu’on le veuille ou non, l’enseignement « traditionnel » avait au moins cette supériorité sur l’enseignement « différencié » qu’il rendait possible l’accès de tous à une culture commune, à partir de laquelle seulement peut s’édifier un monde commun.

    La séparation des individus de cette sphère immatérielle et transcendante par excellence que représente le savoir (au motif, par exemple, que la connaissance du théorème de Pythagore ou des règles de la conjugaison du subjonctif n’aurait, de nos jours, pas la moindre « utilité ») est parfaitement emblématique, de ce point de vue, de l’entreprise d’élimination systématique de tout savoir qui ne déboucherait pas directement sur un « profit » objectivement mesurable. Ce faisant, on fabrique à la chaîne des individus auxquels on aura préalablement inculqué le mépris de la culture, favorisant ainsi leur réduction à l’état d’« atomes » sensibles, coupés de leur passé et de leurs origines, réceptacles passifs et intégralement disponibles aux sollicitations de la marchandise.

    Nous assistons à une accélération de l’extension du libéralisme : destruction de la famille traditionnelle, idéologie du genre, suppression de larges pans de l’enseignement de l’histoire, extension de la novlangue et de l’arsenal répressif contre ceux qui « pensent encore le réel ». Comment envisagez-vous les années à venir ?

    Une autre vertu de la dialectique hégélienne est qu’elle permet d’envisager tout processus historique d’aliénation et de dépossession de soi à grande échelle comme engendrant de lui-même sa propre réfutation. Pour le dire simplement, je pense que l’accélération actuelle des mesures de libéralisation entraînera d’elle-même l’amplification des réactions à son encontre. C’est ce qu’on commence à voir un peu partout, avec l’émergence et la constitution de groupes de réflexion et d’action pour lesquels il apparaît désormais évident que la destruction libérale du monde doit appeler des modalités de résistance organisées et structurées, c’est-à-dire plaçant au cœur de leur engagement la notion de « lien ». Bien qu’un tel chantier puisse être vu comme « utopique » au regard de l’extraordinaire avancement du projet libéral d’atomisation, je suis personnellement convaincu qu’une telle entreprise de réunification porte les germes de notre salut collectif. À condition que nous soyons capables de sortir de cette tyrannie de l’Ego, qui constitue, à n’en pas douter, l’arme d’oppression la plus redoutable – car la plus invisible – du Système.

    Charles Robin, propos recueillis par Pierre Saint-Servan (Novopress, 6 et 7 mars 2015)

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